Land of wonder

Arrivés à Vizzavone nous nous faisons ravitailler par mes parents qui nous amènent un sac que l'on a préparé à l'avance. Ils nous proposent d'arrêter, Dorian étant blessé et moi ayant un ongle incarné qui a commencé à s'infecter. Hors de question ! Nous continuons, et l'on a même pas hésité. 

Nous avons deux options pour cette étape : faire la variante par les crêtes (3 h 30) ou suivre le GR 20. Avec notre blessé, nous ne prenons pas le risque de prendre la variante. 

Nous perdons un peu de temps à trouver le départ de l'étape à Petra Piana. Nous descendons jusqu'au bergeries de Ghjalu, puis nous marchons dans un ruisseau, une première sur le GR ! 

Nous longeons ensuite la rivière Manganellu. Nous arrivons sur une zone remplie de cascades et mini-toboggans. Le soleil n'est pas encore sorti. Malgré tout, nous décidons de nous baigner et de nous placer sous la plus grande cascade. 

Après cette pause glaciale nous reprenons la route, dans la forêt. Nous faisons une pause dans les bergeries de Tolla, où l'on achète du fromage. La passerelle de Tolla est l'occasion pour nos deux amis de sauter. On commence alors l'ascension jusqu'à l'Onda. La pente est douce au début, un peu moins à la fin.

Au refuge de l'Onda, l'aire de bivouac est dans un enclos (on nous explique que les cochons sauvages sont voraces). Nous évitons de peu un orage qui s'est abattu ce jour là à Vizzavona et passons l'après midi à jouer aux cartes dans la salle des repas du soir (les lasagnes de l'Onda, que l'on a pas goûté). 

Certains topos décrivent cette étape comme étant la plus belle du GR 20. Je ne sais pas si c'est vrai, mais cette étape reste une belle étape de montagne. Nous attaquons l'ascension quelques minutes avant le lever de soleil. La première partie n'est pas facile, il faut utiliser les mains sur certains passages. On débouche sur de petites pozzines où un perd un peu le balisage. On continue l'ascension, la végétation nous donne l'impression d'être dans un compte de fées.

La fin de l'ascension se fait dans des éboulis, jusqu'à la brèche de Capitellu. La vue sur les lacs de Melo et Capitello est alors splendide. Le soleil se reflète sur le lac de Capitello. Nous temporisons avant de reprendre notre route.

Petra Piana, nous arrivons !

Encore une grande étape du GR 20. J'ai un peu d'appréhension à cause des 24 kilomètres annoncés. Nous partons avant le lever du soleil. 

Nous suivons la crête. De l'autre côté de la vallée, les premières lueurs du soleil éclairent la bocca di Fuciale. Mais nous descendons pour longer le Golu. L'eau y coule sur de grandes dalles, on se baignerait bien...

 On passe devant des bergeries avant de s'enfoncer dans la forêt. La marche dans la forêt devient vite longue, on en voit pas la sortie. On finit par déboucher sur une route, la première depuis 6 jours ! On accède rapidement au Castel de Vergio avec une épicerie qui se souviendra de nous. Nous avons littéralement fait le plein ; jus de fruits, fruits, bonbons!, charcuterie, fromage... On fait une belle pause petit déjeuner (il est 8h30) avant de repartir dans la forêt. Nous passons devant plein de cochons aux cris étranges. 

On suit le sentier forestier jusqu'à un panneau annonçant le lac de Nino, point de départ de l'ascension. Nous arrivons rapidement à la bocca San Petru et ses arbres caractéristiques. 

Nous continuons l'ascension et longeons des crêtes avant d'arriver à la bocca a Reta. Nous ne voyons toujours pas le lac de Nino et ses pozzines. Mais ça ne saurait tarder !

Nous mangeons au lac, un peu à l'écart des chevaux. L'un d'entre eux m'est littéralement rentré dedans plusieurs fois alors que j'avais en main le fromage et le saucisson. Nous tentons une petite baignade malgré l'eau vaseuse. Mais la journée n'est pas finie ! Nous reprenons la route. Le paysage change, on marche dans une forêt de hêtres qui n'est pas sans rappeler un décor de film fantastique. Nous commençons à nous impatienter, on ne voit toujours pas les bergeries de Vaccaghja. On finit par repérer un drapeau corse ainsi qu'une grande vallée que l'on doit traverser. Nous ne perdons pas de temps. On atteint le refuge de Manganu rapidement. 

Encore des vaches, bien que moins agitées que la veille. C'est pourtant à ce refuge que l'on voit une vache accrocher et déchirer une tente de location. Nous profitons de la rivière pour aller nous baigner. 

C'est notre première journée de "repos". L'étape est annoncée comme faisant seulement quatre heures. Certains randonneurs décident de prolonger l'étape jusqu'au col de Vergio afin de limiter la durée de l'étape suivante (24 kilomètres et 8 heures de marche !). Nous choisissons l'option grâce matinée et étape de 4 h. Malheureusement vers 6 heures je suis obligé de sortir de ma tente à cause de la chaleur étouffante et de la condensation. Nous quittons Tighjettu vers 8 h 30, direction les bergeries d'U Vallone. Nous passons devant de sublimes vasques, mais l'ombre et la fraîcheur nous dissuadent d'aller nous baigner. Il était temps de goûter au fromage corse. Nous suivons alors une courbe de niveau dans la forêt. 

Nous marchons pendant une bonne demi-heure jusqu'à ce que je réalise que j'ai oublié le bâton prêté pour la descente à la bergerie. J'y retourne, nous perdons une heure, il fait chaud, déjà trop chaud (il est alors onze heures). Nous commençons l'ascension en plein soleil, les roches sont brûlantes et par moment je dois mettre la main au sol. Nous passons devant un ensemble de vasques pleines de cascades, j'ai chaud. 

Mais nous avions prévu de manger au refuge vers midi, nous n'avons rien à manger sans réchaud, pas de baignade donc. Cette ascension a été terrible pour moi, nous avons accumulé des erreurs. Quand nous arrivons à la bocca di Fuciale c'est un soulagement. On devine le refuge de Ciottulu di i Mori derrière un petit vallon. 

Le refuge de Ciottulu di i Mori est très particulier. J'en garderai un souvenir très spécial. Nous sommes surpris par l'abondance de vaches sur le lieu. Elles dorment sur les emplacements de bivouac. Mais alors que l'on approche du refuge, nous sommes surpris par des buissons qui bougent et des vaches nerveuses, agitées. On se retrouve alors dans un immense rodéo, avec des vaches folles qui courent et slaloment entre les tentes et changent de direction de façon imprévisible. Elles s'engouffrent et ressortent d'un grand buisson devant lequel nos amis ont installé leur tente (les courageux !). 

On repère une tente de location complètement déchirée par une vache, on observe une vache accrocher légèrement une tente, sans dégâts. Autant dire de suite que ces vaches nous ont fait rire.

Quatrième jour de marche, ça passe ou ça casse. Nous rejoignons le parking de la station d'Asco et commençons l'étape dans la forêt, le long d'une rivière en contre-bas. Nous traversons une passerelle et commençons à nous élever. Nous franchissons de très nombreuses chaînes, soulageant momentanément les jambes, avant de rejoindre un immense pierrier. On peut voir au loin de splendides cascades, on se retourne une dernière fois pour voir d'où l'on vient avant d'affronter la haute montagne corse. 

Les pas sont lourds, avancer est dur sur ce terrain glissant. Je regrette très vite toute les sections de chaînes face aux éboulis.


Nous finissons par déboucher sur un plateau avec vue du dessous sur le Pic des éboulis et le Monte Cinto. Nous profitons du soleil pour nous réchauffer un peu. C'est tout doucement et avec beaucoup de micro-pauses que j'entame l'ascension dans les éboulis jusqu'au pic. Je suis bouche bée devant un petit lac bleu juste en dessous du Monte Cinto. Nous passons devant un névé et ne résistons pas à la tentation d'y inscrire un message pour des amis quelques centaines de mètres de montagne derrière nous. 

Le pic porte bien son nom puisqu'il faut se hisser dans des éboulis pour l'atteindre. Ce qui semble être des mouflons surgissent des crêtes et déboulent à toute vitesse devant moi, j'ai à peine le temps de sortir mon appareil photo. Cette apparition me met de bonne humeur et la fin de l'ascension se fait sans trop d'encombres.

Sur le pic des éboulis je trouve une pioche neuve, provenant d'Asco. On m'indique que sa présence ici est le résultat d'un pari, je ne résiste pas à la tentation de prendre quelques photos avec. J'ai alors un choix. Commencer la descente ou aller jusqu'au Monte Cinto, quelque une heure de marche et 200 mètres de dénivelé plus loin. En fait pour moi il n'y a pas vraiment de choix. Je m'engage alors sur le Cinto, appareil photo à la main. Plusieurs fois je crois être arrivé au Cinto qui se trouve en réalité plus loin... Mais ça en valait la peine. Non, on ne voit pas la mer des deux côtés depuis le plus haut sommet corse. Mais la vue reste néanmoins magnifique.

La descente se fait dans un pierrer. Je recommande l'utilisation d'un bâton. Elle est très longue, et on voit le refuge de Tighjettu très tôt, trop tôt. Nous avons eu tendance à nous laisser glisser dans le pierrier. Attention aux chevilles sur la suite de la descente ! L'arrivée est un soulagement, mais nous n'avons pas la force ni la volonté de rejoindre les rivières qui entourent Tighjettu. Pour la première fois sur notre GR 20 nous entrons dans le refuge et passons du temps à l'intérieur. Tighjettu restera pour moi le pire endroit pour le bivouac à cause du terrain impraticable en tongs. Nous trouvons un jeu de Trivial Pursuit (en version ''Genius'', trop dure pour nous!) et passons l'après-midi à jouer. Le soir, c'est une grande partie de cartes sur les grands blocs de roches entourant les tentes. Après tout, on peut veiller un peut après la journée qu'on a passé !

La nuit tombe sur Tighjettu, on entend la musique dans le refuge, mais ce ne sera pas pour nous !

Nous quittons Carrozzu assez tôt et reprenons le sentier suivi la veille pour accéder aux vasques. Quelques mains courantes nous permettent d'atteindre la passerelle de Spasimata. Le passage se fait à une personne à la fois. Le sentier s'élève sur de grandes dalles rocheuses, il y a très peu de végétation. 

Les mains courantes nous semblent indispensables pour assurer un minimum de sécurité. Le chemin est très technique, frôlant parfois la petite escalade, dangereuse avec nos sacs lourds. Le chemin continue à s'élever, on attend le lac de la Muvrella mais on ne le voit pas. On arrive finalement au lac mais la vue sur ce qui nous attend encore nous fait froid dans le dos. On profite du lac pour se mouiller un peu, malgré l'eau plutôt verte avant d'entamer la dernière partie de l'ascension, un "mur" d'environ 150 m à la verticale. 

Le chemin zigzague dans un pierrier jusqu'à arriver à la bocca di a Muvrella. Nous tombons les sacs et accédons au point culminant du rocher qui surplombe la bocca, le temps d'une photo, d'une vue sur notre parcours du matin avec en arrière plan lointain maintenant la mer. 

Départ au lever du soleil pour cette grande étape de montagne. Le sentier qui quitte Ortu di u Piobbu s'élève dans la forêt. On croise des arbres gigantesques dont un particulièrement beau juste avant ce qui reste de la bergerie de Mandriaccia. La vue sur la "mer de nuages" est à couper le souffle. 

Des arbres plus grands et bien plus vieux que nous...

En effet, tôt le matin un manteau blanc se formait au dessus de la mer, ajoutant de la beauté à un paysage déjà magnifique. Le chemin devient vite de plus en plus technique, nous longeons de grandes dalles rocheuses, je dois régulièrement mettre la main au sol. On passe rapidement devant une source pendant l'ascension, le temps de mouiller la casquette. On finit par déboucher sur la sublime bocca di Pisciaghja, sûrement l'une des plus belles du GR 20. Le vide est partout, les roches fascinent.

Vue depuis la bocca di Pisciaghja

Nous faisons une belle pause avant de finir les derniers 100 mètres d'ascension. On contourne alors la montagne en marchant sur d'immense pierriers. Un faux pas ne pardonne pas, c'est d'ailleurs le cas sur une très grande partie du GR 20. Cette étape se termine par la première grande descente (terrible pour les genoux). De la bocca de l'Innominata, nous rejoignons le fond de la vallée, quelques 900 mètres plus bas. Nous faisons une pause déjeuner sous un grand rocher, mon camarade se cogne et s'ouvre. Les incidents arrivent vite sur le GR 20, nous l'avons remarqué très tôt. 

La fin de la descente est plus tranquille et nous arrivons au refuge de Carrozzu, en pleine forêt. Nous passons l'après-midi abrités du soleil. Le refuge comporte de toilettes sèches (du grand luxe sur cette rando!), nous prenons du taboulé (très bon au passage) comme la veille pour le repas du lendemain midi. Le refuge est près de très grandes vasques, sous la passerelle de Spasimata à 5 minutes de marche du refuge. Il nous semblait inévitable d'y aller. Un conseil, prenez vos chaussures de marche, le terrain est difficile en tongs. Et ne descendez pas dans la vallée (tracé jaune), ce n'est pas le bon chemin. L'eau était fraîche... Mais peut être pas autant que les douches !